La COP28 vient de se terminer avec un accord historique appellant à une transition hors des énergies fossiles ! L'élimination progressive des combustibles fossiles (pétrole, charbon, gaz) est nécéssaire car elle est responsable de 40% des émissions de CO2 mondiales. Cet accord éclipse une autre annonce phare de la COP28 : 116 pays se sont engagés à tripler les capacités d'énergies renouvelables d'ici à 2030. Un objectif ambitieux maix indispensable pour rester sous la barre symbolique des 2 dégrés.
Et la France dans tout ça ? En 2021, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale était de 19%, encore bien loin des 40% fixés pour 2030 par la loi énergie-climat, adoptée en 2019. Alors comment les énergies renouvelables (ENR) peuvent-elles passer à l’échelle ? Pourront-elles un jour couvrir tous nos besoins ? On décrypte ensemble les enjeux de ce secteur clé de la transition.
Énergies renouvelables : de quoi parle-t-on ?
Une énergie renouvelable est générée par des éléments naturels (le vent, le soleil, l’eau). Elle s’oppose aux énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) considérées comme finies et beaucoup plus polluantes. On en distingue 5 :
Les énergies renouvelables constituent la 4ème source d’énergie primaire en France, derrière le nucléaire (40%), les produits pétroliers (28%), et le gaz naturel (15%).
Comment se porte le secteur des ENR en France ?
La France est en retard. En 2021, c’était le seul pays de l’Union européenne à ne pas avoir rempli ses objectifs en matière d’ENR, puisqu’elles représentaient 19% de la consommation finale au lieu des 23% attendus. Si les résultats actuels ne sont pas encore à la hauteur de la feuille de route énergétique que s’est fixée la France, la croissance du secteur, et le rythme d’installation de nouvelles capacités de production, s’accélère : entre le début des années 2000 et aujourd’hui, le pourcentage d’énergies renouvelables dans la consommation finale a été multiplié par deux.
Mais, comme on peut le voir sur ce visuel, il va falloir carburer : nous avons 7 ans pour doubler le volume actuel d'énergies renouvelables. Selon les objectifs prévus par la loi énergie-climat, nous devrons dépasser les 100 gigawatts d’énergies renouvelables d’ici à 2050. Pour mieux se rendre compte, 100 gigawatts d'énergies renouvelables, c'est comme si toute la superficie du Luxembourg était recouverte de panneaux solaires !
Aujourd’hui en France, on compte 8000 éoliennes terrestres, 27 éoliennes en mer, et près de 600 000 installations photovoltaïques. Pour rattraper son retard, la France a donc prévu de multiplier par 10 le volume de production du solaire, et de développer 50 parcs éoliens en mer d’ici à 2050. Alors, par quels moyens peut-on soutenir ce rythme de croissance effrénée ?
Quelles sont les innovations pour accélérer les ENR ?
Pour accélérer le développement massif des ENR, de nombreuses innovations sont à l’étude. Ici, on s’intéresse en particulier à l’éolien et au solaire, où le potentiel d’innovation est important.
Des éoliennes en mer
On connaît bien les éoliennes terrestres, que l’on voit fleurir un peu partout en France. Aujourd’hui, elles produisent près de 9% de la consommation nationale d’électricité sur l’année.
En revanche, on connaît moins bien sa cousine, l’éolienne en mer. Et pour cause, aujourd’hui elle ne représente que 1,9% de la production d’énergies renouvelables. Pourtant, leur technologie évolue plutôt rapidement : dans les années 90, leur puissance était de 0,5 mégawatts. En 2024, elle sera de 16 megawatts, et leur taille sera équivalente à celle de la Tour Montparnasse.
[Comment fonctionne une éolienne en mer ?]
L’éolienne marine produit de l’énergie grâce au vent. Cette énergie est ensuite collectée dans une station immergée qui est raccordée par un long câble sous-marin avec le réseau terrestre. À puissance égale, une éolienne en mer peut produire jusqu’à deux fois plus d’énergie qu’une éolienne terrestre.
On distingue deux types d’éoliennes en mer :
- Les éoliennes posées à de faibles profondeurs, sur un “plancher marin”, véritable dôme de béton qui peut peser jusqu’à 5000 tonnes.
- Les éoliennes flottantes - encore en phase d’expérimentation - qui, grâce à des câbles ancrés au fond de l’eau, pourraient se déployer jusqu’à 250 mètres de profondeur, et donc atteindre des zones plus lointaines où les vents sont plus forts mais aussi plus stables.
Utiliser des terres artificialisées pour l’installation de panneaux solaires
L'énergie solaire représente 4% du mix énergétique français. Pour augmenter son volume d’installation, la loi énergie-climat prévoit de “réquisitionner” des espaces pour faciliter l’installation de panneaux solaires comme :
- Les parkings extérieurs de plus de 1500m2 qui pourront être équipés d’ombrières photovoltaïques
- Les toitures des bâtiments : selon l'ADEME, le potentiel inexploité des toitures est estimé à 364 gigawatts, soit presque 3 fois plus que la puissance de l’ensemble du parc de production solaire français.
- Le photovoltaïque flottant : installé sur des plans d’eau, il permet de produire de l’énergie renouvelable là où l’espace terrestre vient à manquer ou en complément d’installations existantes.
Le stockage stationnaire pour l'éolien et le solaire
Le principal frein au développement des énergies renouvelables réside dans le stockage. Les éoliennes produisent de l’énergie quand il y a du vent et les panneaux solaires, quand il y a du soleil. Logique.
Lorsque le vent ou le soleil sont trop abondants, les éoliennes et panneaux solaires peuvent produire un surplus d’énergie, et inversement lorsqu'il y a peu de vent ou de soleil. Pour pallier cette variabilité, le stockage stationnaire serait une solution très prometteuse. Cette technologie permet de garder le surplus d’énergie produit en excédant à certaines périodes, et de le redistribuer lors des pics de consommation. Par exemple, l’énergie produite en journée pourrait être redistribuée en soirée sur les réseaux lorsque la demande est plus importante.
Les ENR comportent-elles des coûts cachés ?
Le constat est clair : les énergies renouvelables peuvent contribuer à réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre. Mais leur croissance très rapide s’accompagne de préoccupations fortes concernant le risque de travail forcé, l’impact sur la biodiversité, ou le recyclage des matériaux utilisés pour les infrastructures.
Un risque de travail forcé lié aux matériaux de fabrication
Selon un rapport du Clean Energy Council, environ 2,6 millions d’Ouïghours et de Kazakhs ont été soumis à du travail forcé dans la région de Xinjiang en Chine. Or, cette région produit 40 à 45% du polysilicium, un matériau utilisé dans la fabrication des panneaux solaires.
Pour résoudre ce problème majeur, le Parlement européen a adopté une résolution non contraignante qualifiant la répression contre ces populations de crime contre l’humanité, et demandant à la Commission européenne d’agir pour interdire en Europe la vente de ces produits.
Des impacts qui peuvent être néfastes sur la biodiversité
En 2017, 70% des centrales solaires installées dans le monde était au sol, impactant la biodiversité et fragmentant l’habitat des populations locales. Pour limiter cet impact négatif, les parcs photovoltaïques devront être d’abord installés sur des espaces déjà artificialisés - comme mentionné plus haut -
Concernant les éoliennes terrestres, l’impact sur la biodiversité est relativement faible. D’autant plus que la réglementation actuelle est stricte sur le sujet : avant d’implanter de nouvelles éoliennes, il est obligatoire de réaliser une étude d’impact pour éviter d’éventuels risques liés à la biodiversité.
Selon Greenpeace France, les impacts des éoliennes marines ne sont pas encore clairement documentés. Mais ils sont d’abord à étudier au moment de l’installation, cruciale pour les écosystèmes marins. Avec la diminution de la surpêche dans les zones aux alentours, les éoliennes en mer pourraient même favoriser la biodiversité, en attirant une faune riche et variée.
Le recyclage des matériaux utilisés
En réalité, le recyclage des matériaux utilisés pour les panneaux solaires ou les éoliennes est bon ! Aujourd’hui les panneaux solaires sont recyclables à plus de 90%, et dans certains cas, à 95%. Majoritairement composés de verre, d’aluminium et de plastique, ces matériaux assez communs peuvent être recyclés dans les filières industrielles existantes.
Pour les éoliennes terrestres, l’ADEME prévoit des 2025 le démantèlement de 300 éoliennes, représentant des tonnes de matériaux à recycler. Théoriquement, une éolienne – maritime comme terrestre – est recyclable à plus de 90 %, puisque les principaux matériaux dont elle est constituée (béton, acier) sont déjà traités dans des filières bien établies.
L’avis de LITA.co
Dans un contexte où il est urgent et impératif de réduire drastiquement notre dépendance aux énergies fossiles, nous restons conscients que les énergies renouvelables ne pourront pas couvrir tous nos besoins tant que certains freins subsistent (comme les solutions de stockage, la question du foncier, et le déploiement des infrastructures). Nous considérons aussi qu'il faut se concentrer sur l'efficacité et la sobriété énergétique, pour réduire drastiquement nos émissions de GES.
Avec la montée du prix de l’énergie, le développement de notre autonomie énergétique devient crucial. Pour assurer cette résilience, les énergies renouvelables sont clairement envisagées comme une solution. Enfin, nous sommes en faveur des logiques d’autoconsommation pour les entreprises privées, les collectivités ou les particuliers. C'est le modèle prôné par APEX Énergies, entreprise référente dans le photovoltaïque, que nous finançons en ce moment sur LITA.co.
Sources :
- Sur les solutions de stockage : https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/enjeux-et-prospective/decryptages/climat-environnement-et-economie-circulaire/stockage-denergie-accompagner-deploiement-des-energies-renouvelables
- Sur les éoliennes en mer : https://www.geo.fr/environnement/eolienne-en-mer-quels-sont-les-avantages-et-les-inconvenients-215851
- Sur les éoliennes en mer (bis): https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/09/24/eolien-en-mer-les-nuages-s-amoncellent-sur-la-filiere_6190795_3234.html
- COP 28 : https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/11/21/cop28-tripler-les-capacites-d-energies-renouvelables-d-ici-a-2030-un-objectif-atteignable_6201339_3244.html
- Sur l’impact environnemental des éoliennes : https://www.greenpeace.fr/impact-environnemental-eolienne/